vendredi 15 juin 2018

Au secours je suis une bobo (bis)


           Bonjour les loulous,
           C'est les vacances, je blogue !
          Enfin non, ce n'est pas exactement les vacances, parce que la semaine prochaine je surveille le bac et qu'après je dois corriger les copies puis aller faire passer les oraux de rattrapage puis assister à la réunion où on décide à qui on donne le bac ou non. Cette fameuse réunion de début juillet qui ressemble à s'y méprendre à une vente aux enchères. Ca se passe comme ça : la personne qui préside dit qu'il manque tant de points au numéro 692 pour avoir son bac ou une mention et là les profs dans la salle qui ont corrigé ses copies lèvent la main pour dire qu'ils les lui donnent. Illustration : "Je vois le prof de philo à gauche qui accepte de donner un point supplémentaire, coefficient 7 ça fait 7 points, qui renchérit ? Il lui manque encore quatre points pour avoir son bac, allez les profs d'anglais ou d'histoire, vous êtes coefficient 4, faites un effort ! Ah, je vois un prof d'histoire généreux qui lève une main à droite, qui dit mieux ? c'est votre dernier mot ? Adjugé ! Il a son bac !". Il est très très rare qu'on ne le donne pas. J'ai le souvenir d'un élève l'année dernière à qui il manquait encore beaucoup de points après avoir passé le rattrapage (oui parce que cette réunion a lieu après les oraux de rattrapage, hein). Dans ces cas-là, et dans ces cas-là uniquement, on regarde le dossier de l'élève. Il n'y avait que des "occupe une chaise", "absent tout le trimestre", " ne fait rien", "passe son temps à bavarder". Eh ben on avait fait un vote à main levée et il y avait une quantité infime de profs (dont moi) qui voulaient le faire redoubler. Je me souviens que quand j'avais levé la main beaucoup de profs (pas mes collègues, c'est toujours des profs inconnus dans un bahut inconnu) m'avaient regardée comme si j'étais une nazie. C'est quand même ouf : ça sert à quoi de dire à nos élèves qui ne foutent rien de toute l'année que s'ils continuent comme ça ils n'auront pas leur bac si personne ne redouble jamais ? C'est comme les "Si tu continues comme ça tu ne passeras pas en ES" : on a beau le dire, en fait ça dépend de plus en plus de la volonté des parents et les élèves le savent. Oui parce que contrairement à ce que pensent certains (sans te citer, Lady V), être de gauche ne revient pas à penser que la moindre sanction est nazie. Je suis évidemment pour qu'on arrête de faire passer tous les élèves dans la classe supérieure indépendamment de leurs notes et aussi pour qu'on arrête de caresser les gamins qui ne foutent rien dans le sens du poil et qu'on les responsabilise bien davantage qu'on ne le fait aujourd'hui (et non, le fait de penser ça ne signifie pas que je suis de droite sans le savoir). Parce que si je pense qu'il faut punir ou faire redoubler certains élèves, c'est pour leur bien et pour le bien de l'école en général. Croyez le ou non mais je suis une super gentille prof. Souriante, à l'écoute, bienveillante, mais ferme et intransigeante sur certains trucs. Qui a dit que punir un enfant qui fait une connerie, c'était mal ? Depuis quand c'est rendre service à un môme que de lui donner tout ce qu'il veut sans contrepartie ? Depuis quand laisser un môme largué passer dans la classe suivante et en plus dans une filière exigeante, c'est lui rendre service ? (Mais je me répète, non ? Comme une vieille prof qui tourne en boucle ? Caramba). Bref, non, je ne suis évidemment pas pour qu'on donne le bac à tout le monde : si un élève n'a pas assez bossé, je pense qu'il doit redoubler un point c'est tout. Et ça n'est en rien incompatible avec le fait que je suis contre Parcoursup, je ne vois pas le rapport.
          Beaucoup de gens pensent que Parcoursup est très bien parce que ça permet de faire des économies en arrêtant de payer la fac à "ces vilains cancres de banlieue qui dilapident nos impôts en allant dans des facs qu'ils ne méritent pas", argument qui s'apparente dangereusement à mon sens au discours sur la bienvenue réduction des minima sociaux parce que "les pauvres sont des assistés". Parcoursup est ignoble à plein de niveaux. Déjà parce qu'un môme qui a le bac a le droit de faire les études supérieures de son choix, point, et que ce n'est pas normal qu'un môme qui a genre 12 de moyenne ait moins de chances de faire les études de son choix qu'un autre qui a eu plus. Ensuite parce que c'est ignoble qu'à notes égales, un élève qui vient d'un lycée prestigieux ait plus de chances de faire les études qu'il a choisies qu'un élève qui est allé dans un lycée moins côté. Oui parce que les facs prennent notamment en compte le lycée d'origine des candidats pour sélectionner (et leurs taux de réussite au bac), maintenant tout le monde le sait. Ensuite parce que le système est profondément opaque et inégalitaire vu qu'en plus des critères nationaux de l'algorithme, chaque fac peut rajouter des critères de sélection qui lui sont propres en toute opacité : les élèves naviguent donc à vue, c'est un peu comme de jouer une partie de poker sans connaître ses cartes. Certains critères de sélection commencent à fuiter, cela dit, comme celui de Jussieu ou de Paris-Diderot par exemple. A Jussieu, apprenez par exemple qu'alors qu'encore l'année dernière ils recevaient en gros 40% de parisiens, 30% de lycéens venus de l'académie de Versailles et 30% de lycéens de l'académie de Créteil, aujourd'hui le taux de parisiens est passé à 75% et que les 25% de places restantes sont réservées aux élèves non-parisiens, sans aucune priorité pour les élèves d'Ile de France sur ceux de province, ce qui handicape encore davantage les élèves de banlieue parisienne qui ont déjà moins de chance d'être bien placés sur Parcoursup vu que les lycées de banlieue ont généralement des taux de réussite au bac plus faibles que les lycées de province. Alors évidemment du coup ça donne davantage de possibilités à des lycéens de province de venir à la fac à Paris, mais moi je vois surtout qu'avec ce système, des élèves à moi qui habitent à quelques stations de métro d'une fac parisienne y sont refusés et se retrouvent "en attente" dans des facs de banlieue où il leur faudra prendre deux métros et un RER pour se rendre. (Pire, j'ai de vraiment bons élèves qui ne sont même pas "en attente" dans la fac de banlieue la plus proche de chez eux mais carrément refusés. Sérieusement, faudra m'expliquer.) Ayant grandi en banlieue, ni moi ni bon nombre des gens avec qui j'ai fait mes études n'aurions pu aller à la Sorbonne avec ce système. Je vois aussi qu'avec ce système, des élèves parisiens ayant eu 8 de moyenne toute leur année de terminale (et n'ayant donc pas le niveau bac, qui est à 10) sont passés devant des banlieusards ou des provinciaux avec 16 de moyenne (on repassera pour la méritocratie dont on nous rebat les oreilles, du coup, hein). Bref un système super opaque et inégalitaire (depuis la loi Pécresse de 2007, qui prévoyait que toutes les universités accèdent à l’autonomie dans les domaines budgétaire et de gestion de leurs ressources humaines et qu’elles puissent devenir propriétaires de leurs biens immobiliers, l'autonomie des universités ne cesse de grandir, d'où des systèmes différents dans chaque fac, qui font leur marché à leur sauce) qui encourage l'entre-soi et la reproduction sociale. Et pour ceux qui pensent que tout ça c'est parce qu'APB était horrible avec son tirage au sort et tout, rappelons que le tirage au sort n'a recalé que 2465 candidats au niveau national en 2017 (soit 0.45 % des admis), et qu'il aurait été beaucoup plus simple de traiter le problème en créant quelques places supplémentaires dans les filières dites "en tension". Et pour ce qui est de l'argument du gouvernement selon lequel il faudrait absolument réformer l'université parce que le taux d'échec y est grand, rappelons également que le "taux d'échec" en licence est un indicateur qui amalgame des situations très hétérogènes (redoublement, réorientation, réussite à un concours hors université...), et que contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire pour faire passer des réformes iniques, le système d'enseignement supérieur français est l'un des plus performants des pays de l'OCDE, avec un taux de diplomation supérieur à 80 %. Donc on va arrêter de se mentir : le but de Parcoursup, c'est de faire des économies et de mettre en place la privatisation de l'université, point. Et ça - surprise - je suis contre. 
          Mais bon, je m'égare.
          Revenons à mon sujet premier : je suis en vacances jusqu'à lundi prochain !
         J'ai dit au revoir à mes élèves (qui pour certains sont venus en classe entière jusqu'à après le conseil de classe pour jouer au loup garou ) (non mais je vous demande un peu, qu'est ce que c'est que cette nouvelle génération qui ne sèche plus !) (enfin je dis ça mais mes terminale étaient quand même à 550 demi journées d'absences au troisième trimestre, moi je dis chapeau), bref, les cours, les élèves, tout ça, c'est fini, et j'ai déjà vécu hier ce moment divin dans la vie d'un prof où tu jettes ton carnet de bord avec les notes, ton cahier de texte avec tous les cours de l'année, les bulletins d'absences et tous les vieux polycopiées et les dernières copies qui traînent... une libération, un bonheur. Du coup maintenant je traîne à moitié à poil sur le lit pendant que Tom Tom est au boulot et je regarde les appartements à vendre sur PAP (De Particulier A Particulier, donc, pour ceux qui ne connaîtraient pas, ce site magique où tu peux regarder les annonces d'appartements à vendre près de chez toi et constater avec effroi que tu n'as pas les moyens de les acheter). Non parce que bon, autour de nous ça se marie, ça achète, ça fait un enfant, voire ça en fait un deuxième, voire ça revend un premier bien immobilier pour en un acheter un plus grand afin d'y loger sa marmaille. Autant dire que Tom Pouce et moi qui louons un 30mètres2 à deux, on en est loin, et que quand on va chez certains potes qui ont un lave vaisselle on se dit que wow, c'est de vrais adultes dis donc. On aimerait bien éventuellement quitter Paris pour vivre mieux mais on aime nos boulots et on a nos amis ici, donc on regarde pour voir les annonces des trucs en banlieue proche. Mais bon, pas facile de trouver en banlieue proche, desservi par le métro, un appart' pas cher mais spacieux, lumineux, avec une jolie vue, dans un quartier sympa, avec du parquet parce que le carrelage c'est beurk et avec une possibilité de cuisine américaine et une baie vitrée qui donne sur un balcon ou un petit jardin mais les jardins c'est en rez de chaussée donc l'appart' est moins lumineux donc c'est moins bien et puis aussi avec une cave et un parking parce que eh, oh, on n'est pas des bêtes. Bref, je crois que Tom Pouce et moi ne sommes pas bien au fait des réalités de l'immobilier à Paris. (Dois-je préciser qu'on a en moyenne 400 euros d'apport ?) (Mais je ne désespère pas de trouver un appartement très bon marché dont le seul inconvénient serait qu'il y a une sorcière dans le placard à balai). Et puis on n'a pas très envie de s'endetter pendant vingt ans, et Tom Tom est un relou qui a des principes (quelle idée, aussi, franchement) et rechigne à participer à la bulle immobilière (vous saviez qu'il y a 40 ans, les gens dépensaient 30% de leur salaire en bouffe et 10% en logement et que depuis ça s'est inversé ?). Mais on voudrait peut-être faire un petit loulou (oui) (Lady V, arrête de faire la grimace, je te vois d'ici) et c'est difficile de se projeter quand on vit dans 30 mètres carré. Et puis vous comprenez, c'est terrible ce qu'il nous arrive parce que si presque la moitié de nos salaires passe en remboursement eh ben on ne pourra plus trop payer de billets d'avion ni rien et on sera obligés de passer la plupart de nos futures vacances chez des potes ou dans la maison de vacances bretonne au bord de la mer de mes parents ou bien dans la petite maison avec jardin des siens dans la campagne normande... Putain, trop dure la vie.



          Bref, ce petit extrait de la Belle Verte me permet de faire une transition sur le sujet dont je voulais au départ parler aujourd'hui (oui parce que c'est pas la fin du post, en fait, c'est le début) (si) (tenez bon) : le fait que je ne suis pas seulement devenue une dangereuse gauchiste, féministe de surcroît, mais qu'en plus je suis aussi devenue une beatnik. Une de ces illuminés qui mangent bio et qui refusent d'acheter le fromage en supermarché parce qu'il est emballé dans du plastique, vous voyez ? 


          Il faut dire que j'ai un mec dont la soeur sage-femme vit en centre Bretagne dans une yourte (avant d'avoir longtemps habité dans une roulotte) (si), fait de l'herboristerie et se met sur le corps des onguents préparés par des druides (si), et accouche des femmes sans péridurale, pieds nus en sarouel dans la forêt en faisant des incantations en celte ancien (enfin j'imagine). Bref vous imaginez bien qu'une belle-soeur comme ça, on n'en sort pas indemne !
          Tous ces gens (ma belle famille) qui vivent en pleine campagne, font pousser leurs tomates (putain qu'est ce que c'est bon une vraie tomate !), ont des poules, font leur propre cidre, font à l'occasion des tours de France en roulotte poussée par un cheval (si) et recyclent absolument tout depuis des générations (l'atelier de feu le grand-père de Tom Pouce, qu'ils appellent la Samaritaine parce qu'on y trouve de tout, est une sorte de hangar Emmaüs à lui tout seul) m'ont fait découvrir des choses, à moi petite donzelle des villes biberonnée au béton et à la surconsommation de masse. Notamment - wait for it - que le maréchal ferrant n'était pas un personnage historique comme le Maréchal Pétain. (Oui). (Je sais.) Il y a des jours comme ça où je brille tout particulièrement par mon intelligence, comme quand je me suis exclamée à Tahiti qu'en Polynésie le monoï était de bien meilleure qualité qu'en France parce qu'en France il était tout le temps tout figé - ...pause de recueillement pour ma dignité partie trop tôt... - ou quand j'ai dit à BB que les crevettes toutes noires qu'elles m'avaient fait acheter étaient chelou, avant d'avoir une révélation en les voyant devenir roses dans la poêle. (Oui parce qu'au passage, donc, je suis allée à Tahiti avec Tom Tom pour voir BB et Pollyanna, et je pourrais vous raconter comment on a nagé avec une baleine et tout, mais en fait non parce que comme je suis relou je préfère vous parler Parcours Sup et éponges bio-dégradables) (Vous êtes contents, hein?). M'enfin le plus fabuleux c'était peut-être quand même l'autre jour, quand j'ai constaté que le soleil se couchait derrière l'Opéra Garnier alors que "Non mais c'est trop chelou d'habitude il se couche derrière la Tour Eiffel !" : ou comment j'ai appris à 37 ans - et après cinq ans à regarder le soleil se coucher sur Paris depuis la même fenêtre, quand-même - que non, le soleil ne se couchait pas exactement au même endroit toute l'année. (Si vous ne le saviez pas non plus  pour le maréchal ferrant, les crevettes, le soleil (le monoï je n'ose pas l'espérer), merci de me le faire savoir pour que je me sente moins seule) (je suis aussi preneuse de toute anecdote profondément honteuse du même acabit). Bref, l'arrivée de Tom Pouce a évidemment accéléré ma boboisation déjà bien entamée. Mais bon, en vrai j'avais déjà doucement commencé avant de le rencontrer, et puis surtout je suis simplement un produit de mon temps, et je go with the flow, parce que même si le nombre de personnes encore à la traîne aujourd'hui est assez effarant, on est nombreux à avoir énormément changé nos modes de consommation ces dernières années, voire ces dernières décennies pour les plus dégourdis.
          Du coup j'ai décidé de vous faire un petit résumé de mes nouvelles pratiques de consommation de ces dernières années, en mode de meubles, de vaisselle, de fringues, de cosmétiques, de bouffe, de produits d'entretien... Funky, hein ? Ouais, je sais, mes posts sont wild en ce moment. (En même temps je viens de vous avouer que je passais plusieurs heures par jour sur PAP pour regarder les annonces de maisons en banlieue, donc vous espériez quoi, mes pauvres amis ?)
          Parce que quand on y pense c'est ouf : quand j'étais petite, il ne me semble pas que le concept de consommation responsable faisait partie de mon univers ni de celui de mes parents. L'écologie, tout ça, ça ne faisait pas partie de mon univers mental. Quand on s'interrogeait sur ce qu'on bouffait, la question était de savoir si c'était bon au goût et/ou bon pour la santé parce que trop gras, trop salé ou trop sucré, mais je n'ai aucun souvenir d'avoir un jour entendu parler de la possibilité qu'il y ait des trucs toxiques dans ma bouffe, ou que la culture de tel ou tel aliment soit néfaste pour la planète. Bon, en même temps ça tient peut-être simplement à ce que je vivais dans une famille qui n'en avait rien à branler, mais je pense qu'à l'époque les gens qui s'en inquiétaient étaient une minorité. Les quelques événements qui ont éveillé ma conscience à l'adolescence se comptent sur les doigts d'une main, et je m'en souviens très bien, ce qui prouve à quel point ils étaient inédits. A genre 15 ans, je suis allée chez ma tante en Angleterre et j'ai découvert qu'elle avait quatre poubelles différentes pour recycler, un truc dont je n'avais jamais entendu parler de toute ma vie. A genre 19 ans, j'ai passé beaucoup de temps chez mon amie Molly et alors qu'on se brossait les dents un jour avant d'aller se coucher et que je laissais couler l'eau pendant que je me brossais les dents, elle m'a positivement grondée en me disant, choquée : "Putain t'as pas été éduquée de façon écologique, toi !". Je m'en souviens encore. A peu près à la même époque, il y a eu une campagne de pub dans le métro pour inciter les gens à arrêter de gaspiller l'eau et de laisser les lampes allumées en leur absence. Une des affiches représentait une machine à laver dont le tambour, ouvert, contenait le corps détrempé et sans vie d'un tigre : le message joint demandait aux gens d'arrêter de faire tourner des machines à moitié vides. L'autre affiche représentait une pièce vide avec une lampe de chevet allumée, et sur le sol, saucissonné dans le fil de la lampe, il y avait un dauphin mort. Ca m'avait beaucoup marquée, et c'est resté un truc dans ma famille : maintenant, à chaque fois que quelqu'un part sans éteindre la lumière, on l'accuse de tuer les dauphins. Dernière chose : à 21 ans, je suis allée en Argentine, en pleine crise économique, et j'ai découvert que les emballages dans les supermarchés y étaient minimes et que le verre y était consigné. Le système de consigne, ce truc super malin qu'on n'a même pas encore été foutu de mettre en place en France, pays de la honte où on recycle nos déchets avec le cul. Bref, autant dire que jusqu'à récemment, ma conscience écologique était assez minime. J'avais bien une amie proche qui était végan et n'utilisait que des shampoings Lush solides, mais elle croyait au pouvoir des pierres et ne voulait pas porter de cuir ou manger de miel parce que c'était pas gentil pour les abeilles et pour moi c'était un peu une illuminée, je me souviens qu'à l'époque la souffrance animale ne me faisait absolument ni chaud ni froid et que j'étais persuadée qu'une vache avait un système nerveux proche de zéro. J'étais con. Je me souviens aussi très bien d'avoir jeté des sacs entiers de vêtements dont je ne voulais plus quand j'avais genre 15 ans, vous imaginez ? Plus jamais je ne ferais ça aujourd'hui. Maintenant je donne tout à Emmaüs ou à des collectes pour les migrants (vous croyez que je vais être fichée S pour délit de solidarité ?) et même mes chaussettes trouées j'essaye de les recycler.
         Ma conscience écolo s'est réveillée et j'ai changé mes habitudes de consommation il y a environ trois ans. Un des grands déclics pour moi a d'une part été le documentaire américain The True Cost, qui a changé drastiquement ma façon d'acheter des fringues. J'ai aussi notamment lu Saison Brune, une BD documentaire de 500 pages sur l'écologie que je ne peux que vous recommander, même si je vous préviens ça fait bien flipper (sans vouloir vous spoiler, je vous préviens d'avance que le mot de la fin est cette citation de Woody Allen : "J'aimerais terminer sur un message d'espoir. Je n'en ai pas. En échange, est-ce que deux messages de désespoir vous iraient ?").
          Bref, commençons par les fringues. Déjà, je n'achète presque plus de fringues parce que, si je suis honnête, j'en ai déjà assez pour cette vie et la suivante. Ensuite, depuis trois ans, je n'ai presque pas mis les pieds dans un magasin de fringues classique. Je n'ai plus jamais mis les pieds chez H&M, Zara, Gap, Uniqlo, Etam, American Vintage, et j'en passe, qui exploitent la main d'oeuvre dans les pays en voie de développement et polluent leurs eaux avec des produits toxiques (qu'on retrouve sur les vêtements, d'ailleurs, c'est pourquoi il faut toujours les laver avant de les porter - si c'est pas flippant, ça, déjà). Quand parfois je me suis retrouvée à regarder les fringues genre chez Monoprix, j'ai toujours vérifié où étaient faites les fringues qui m'intéressaient, et j'ai entièrement cessé d'acheter des trucs faits en Chine, en Inde, au Bangladesh, en Indonésie, au Pakistan. Je n'achète plus que des trucs faits en Europe, et encore, car en fait je n'achète surtout plus que des trucs d'occasion. Je le faisais déjà beaucoup parce que je n'aime rien tant au monde que de traîner des heures dans des vides greniers et que je suis pauvre, mais c'est devenu un acte plutôt militant alors qu'avant ça n'était que pour faire des économies. Je n'achète plus non plus d'objets neufs, ou si peu. Les vide-greniers partout en France et les dépôt-ventes de Bretagne faisaient déjà mon bonheur, l'arrivée récente des boutiques Emmaüs dans Paris (que j'attendais comme le messie depuis mon année à Londres au début des années 2000 où je hantais les charity shops jour et nuit) ont changé ma vie. Aujourd'hui, il ne me viendrait plus à l'idée d'acheter un mug made in China chez Monoprix alors qu'il y en a chez Emmaüs (et que les vide-greniers divers et variés ont pu avec les années assouvir ma boulimie pourtant intarissable de bols bretons vintage aux noms de Colette, Jeanne, Raymond ou Pierrick). Je n'achète plus non plus mes livres neufs, sauf ceux qui viennent de sortir, que j'achète dans des petites librairies grâce au site parislibrairies.fr (c'est un site super où tu tapes le nom du bouquin que tu cherches et on te dit où il est en stock mais tu peux aussi le réserver dans la librairie en bas de chez toi s'ils ne l'ont pas). Sinon j'achète d'occaz, dans les vide-greniers encore, chez Emmaüs, chez Oxfam (il y en a un à côté du métro Voltaire et quelques autres dans Paris), ou bien chez Gibert ou sur Amazon, même si je n'aime pas tellement leur donner de la thune, surtout à Amazon. Un truc que j'ai découvert récemment, c'est la possibilité d'acheter des bouquins d'occaz sur Price Minister à des particuliers qui habitent à Paris et d'aller chercher les trucs chez eux. C'est comme ça que j'ai acheté presque l'intégral de Magasin Général, une BD que je vous conseille chaudement, et une bonne partie de mes cadeaux de Noël (oui, pour Noël j'achète souvent exclusivement des bouquins, et d'occaz (mais en bon état, hein) et je commence petit à petit, en bonne adepte du zéro déchets, à boycotter le papier cadeau qui ne se recycle pas). Je suis aussi complètement accro au Bon Coin, où j'ai dernièrement passé presque une heure par jour. J'y achète des meubles pour Tara (la maison de Bretagne), et je redoute le moment (qui approche à grands pas) où il y aura suffisamment de meubles et plus besoin d'en acheter. (Pour vous donner une idée de mon addiction, l'autre jour j'annonçais à Tom Pouce, toute chonchon, que la commode que j'avais repérée chez Emmaüs avait été achetée, mais il a su trouver les mots pour me consoler : il m'a dit que la bonne nouvelle, c'est que du coup j'allais pouvoir continuer à en chercher une). Même mes chaussures, même mes maillots de bain, je les cherche sur Le Bon Coin ou je les achète dans des dépôt-ventes. Et quand je ne peux pas acheter d'occaz entre en jeu l'achat équitable made in France. Du coup j'ai acheté par exemple des bottes chez Arcus et un pull Armor Lux (mais à -50%, hein, je vous rassure). Et on a tous les deux des charentaises faites en Charente (hihi), de la marque Rondinaud que je ne peux que vous recommander et sur la semelle desquelles il y a écrit ça :


     
            Bref, chez nous c'est boboland.
          Pour les trucs de cuisine il y a Matfer ou Le Creuset, parce que c'est de la bonne cam' fabriquée en France. Des trucs chers, donc, bien sûr, mais quand c'est vraiment de qualité et fait par des gens payés correctement ça coûte forcément plus cher et c'est bien normal. J'achète des trucs sur Etsy, parfois, aussi, parce que comme ça je les achète à des particuliers - toujours en France - qui font les trucs eux-mêmes. Et puis pour les caleçons et les culottes il y a Le Slip Français (mais si vous avez d'autres adresses je suis preneuse) !
          Ensuite, qu'est ce qui a changé dans ma salle de bain ? D'abord, j'ai acheté une cup qui recueille mon sang tous les mois tel le Graal. Fini donc toutes les saloperies jetables. Ensuite, j'ai arrêté les disques de coton et j'ai acheté des disques à démaquiller en coton qui se lavent à la machine. Et puis surtout, je suis passée au shampoing et à l'après shampoing solides achetés en vrac chez Lush ou chez Day by Day ou chez Biocoop (mais là y a du plastic autour, beurk). Il va sans dire que je n'utilise que des pains de savon, le savon liquide est désormais banni de mon quotidien. Du coup j'ai surtout fait des trucs pour réduire mes déchets. Oui parce que quand tu commences à réfléchir à l'impact écologique de ce que tu achètes, ça devient compliqué de faire les courses. Parce que souvent je me retrouve le cul entre deux chaises, notamment quand j'achète du lait : est-ce que j'achète le lait bio mais avec une bouteille en plastique ou le lait pas bio dans une brique en carton ? Oui parce que le carton se recycle beaucoup mieux que le plastique, d'où le dilemme (ma vie est semée d'embûches). J'en parlais à un copain qui me disait que pour lui la question ne se posait même pas, qu'il refusait de manger de la merde et que l'écologie passait après, eh bien force est de constater qu'en ce qui me concerne ça doit être l'inverse parce que j'achète beaucoup plus souvent le lait non bio mais en carton (celui de La Marque Du Consommateur, vous savez, cette nouvelle gentille marque de bouffe qui rémunère correctement les producteurs). Non mais vous rigolez peut-être mais ce sont réellement des cas de conscience que j'ai à chaque fois que je fais les courses, maintenant. Genre avant d'acheter du beurre je regarde si l'emballage se recycle (c'est rarement le cas) avant d'acheter (et souvent l'emballage du beurre bio ne se recycle pas). Je n'achète plus que des yaourts avec des pots en verre, aussi, parce que le verre se recycle mais pas les petits pots en plastique. (Encore mieux : avec Tom Tom on a trouvé un fromager qui nous remplit direct notre gros bocal de fromage blanc !). On achète nos fruits et légumes en vrac au marché (jamais emballés dans du plastique) et les jours de marché on ramène toujours les mêmes petits sacs en papier (vous savez ceux dans lesquels tu mets les légumes). On a des cabas, bien évidemment, et on n'achète que des trucs qui viennent de France ou à la rigueur d'Espagne ou d'Italie mais jamais plus loin (adieu bananes) (sob). Ah oui et on bouffe des trucs de saison, aussi. Vous savez qu'il y a encore quelques années j'ignorais complètement quels fruits et légumes se cultivaient à quelle époque ? Il faut dire que mon père nous a toujours cuisiné de la ratatouille en accompagnement de presque tous les plats imaginables, qu'il pleuve qu'il vente ou qu'il neige, donc ça a été difficile pour moi d'admettre que pour bien faire j'allais devoir arrêter les tomates trois quarts de l'année... Même dilemme au marché, aussi : il y a des producteurs d'Ile de France qui vendent leurs trucs, mais c'est pas bio, et surtout il se trouve que les producteurs locaux de notre marché mettent tout sous plastique, donc on achète bio, mais on aimerait bien soutenir les petits producteurs locaux, et notre bio il est français mais pas super local, donc bref : dilemme. Mais je le répète : on va généralement vers les fruits et légumes bio. Parce que je ne sais pas si vous avez remarqué, mais les produits bio pourrissent super vite, et sachant ça, quand je repense à toutes ces tomates au plutonium que j'ai mangées dans ma vie qui restaient belles et fermes pendant des semaines, ça me fait flipper...
          Et puis il y a les trucs pour le ménage. Et pour ça on a découvert Day by Day, une chaîne d'épiceries zéro-déchets où tu achètes tout en vrac : l'huile, le vinaigre, le miel, le sel, le sucre, le café, le vin, les pâtes, les céréales, les croquettes pour chat, et aussi la lessive, le liquide vaisselle, le vinaigre blanc, le savon noir (les deux derniers étant non néfastes pour la planète et tout aussi efficaces que du Saint-Marc ou du Cif pour laver votre maison). Tu viens avec tes contenants, tu remplis, et zou. C'est juste top. Donc là, quand notre lessive, notre savon noir, notre vinaigre blanc et notre liquide vaisselle (tous bio) seront finis, eh ben on ira re-remplir nos bouteilles à la boutique et c'est tout. Zéro déchets indeed. Et pour nettoyer la maison perso je suis passée à une petite mixture conseillée sur le site d'Antigone 21 faite d'eau, de vinaigre blanc et d'écorces d'orange bio. Et ça suffit largement. Et on utilise aussi, achetés chez Biocoop, des gants de vaisselle écolo, des sacs poubelles écolo et des éponges écolo, bref des trucs qui se bio-dégradent mieux (genre pas en 2 000 ans), et aussi je lave les éponges. Non mais ça c'est un truc qui ne m'étais jamais venu à l'idée avant, vous imaginez ? Ton éponge quand elle est dégueu mais pas encore défoncée en fait t'es pas obligé de la jeter, tu peux la laver. Ouf, non ? En fait quand tu commences c'est sans fin, tu te rends compte que tout ce qui est chez toi ou presque est mauvais pour l'environnement. Par exemple chez Day by Day ils avaient un gros carton plein de stylos en plastique avec un mot qui invitait les gens à ramener les leurs quand ils n'avaient plus d'encre et j'ai réalisé que ouais, putain, tous ces stylos qui vont à la poubelle ils deviennent quoi ? Et votre PQ, vous savez s'il se bio-dégrade bien ? Et le truc bleu que tout le monde met dans ses chiottes pour tuer les bactéries et éviter le tartre ou que sais-je, ça lui fait quoi à l'eau d'après-vous ? Jamais de ma vie je n'avais pensé à tous ces trucs avant il y a quelques années. Et la crème solaire qu'on met en été, vous savez qu'elle est mauvaise pour nous parce que pleine de micro-particules mais qu'elle pollue aussi la mer et les océans quand on se baigne ? Du coup on se met à changer des détails dans sa vie de tous les jours, genre maintenant on achète le poivre en vrac et on a un moulin à poivre Peugeot acheté dans un vide grenier au lieu de racheter régulièrement des petits moulins en verre au supermarché. Et on achète généralement le pain à la boulangerie et le fromage à la fromagerie pour éviter les emballages plastique de supermarché, ce genre de choses. On va à la déchetterie pour jeter certains trucs, aussi.
          Alors évidemment je sais bien que c'est super pas facile de faire gaffe à tout tellement on baigne dans les produits polluants, que tout le monde n'a pas forcément accès à tous ces trucs écolos, qu'on n'a pas toujours envie de se prendre la tête à ce point (quand je rentre claquée du taf et qu'il n'y a rien à bouffer, il va sans dire que j'achète des trucs au supermarché en bas même s'ils sont sous plastique et que je ne fais pas trois stations de métro pour aller acheter "responsable"). Je vous rassure, hein, je ne suis pas une ayatollah, je continue à prendre la voiture voire l'avion et à polluer pour partir en week-end, à manger MacDo, à boire du coca même si je sais qu'il y a du round up dedans, et je ne fais même pas chier mes parents qui achètent deux packs de bouteilles en plastique d'eau gazeuse par semaine - même si ça me défrise - et tout plein de savon et de shampoing dans des bouteilles en plastique. Et puis je sais que le bio est devenu un truc marketing comme un autre et que là aussi il y a des pièges à con et aussi que non, ce n'est pas en lavant dix éponges par an et en moulant du poivre dans un petit moulin en bois que je vais sauver le monde. Je sais tout ça. Mais bon, comme vous l'avez certainement compris dans mon dernier post, j'essaye d'adapter mon mode de vie à mes convictions, je suis pour les initiatives individuelles, et je suis convaincue qu'un individu plus un individu plus un individu et ainsi de suite, ça fait beaucoup de monde et que donc ça peut avoir un impact non-négligeable. Surtout parce qu'en créant une demande de produits écolo, on incite des mecs qui veulent se faire de la thune à investir dans des trucs écolos pour faire des profits, et que c'est déjà ça de gagné. Et évidemment on ne peut pas tout faire mais ce n'est pas parce qu'on ne peut pas tout faire qu'il ne faut rien faire. Et si chacun fait de son mieux, eh ben c'est déjà énorme. Donc encore une fois c'était un petit (enfin petit, tout est relatif) message de blog pour essayer de sensibiliser les gens à un truc qui me tient à coeur.
          Voili voilou.
          Et, euh... c'est tout pour aujourd'hui.