vendredi 6 avril 2012

Où est mon Charlie ?


C'est le week-end de Pâques.
C'est le moment ou jamais d'envoyer à un homme le même texto que Lady V à son amant l'année dernière : "Si tu me montres ton lapin en chocolat, je te montrerai mon gigot pascal".

Gentleman Joe me manque.

J'ai rencontré Gentleman Joe il y a dix ans, exactement trois semaines avant Pâques.
Nous avions 21 ans.

Quand on était ensemble, Gentleman Joe et moi fêtions Pâques. 
Tout a commencé quand, la première année, j'ai caché chez lui des Carambars au nougat (ses préférés) pendant qu'il était à la fac. (N'est-ce pas que c'est choupi ?) (L'autre jour, une lectrice m'a dit que j'étais "choupi". Je suis tout à fait d'accord avec elle. Je suis une fille follement choupi. D'ailleurs je l'ai toujours dit).
Après ça, c'est devenu un rituel.
Souvent, on allait au parc, et on cachait des oeufs en chocolat un peu partout.
Et si vous trouvez ça ridicule, c'est votre droit, mais permettez-moi de vous écraser de mon mépris en vous faisant cette réponse : miroir magique revient sur vous.
Et par ailleurs, puis-je également me permettre de vous rappeler, chers lecteurs, que c'est c'ui qui dit qui est. Non mais.
Moi, en vérité je vous le dis : c'était bien.
Enfin, sans compter les petits monstres voleurs de chocolat qui hantent les espaces verts parisiens, prêts à piquer leurs oeufs aux premiers trentenaires venus. (Je ne sais pas ce que vous en pensez mais moi je trouve que c'est pas joli joli).
Et c'est d'autant plus rageant que quand leur mère te les ramène, tout penauds et traînant les pieds avec des oeufs plein les poches, en leur disant que c'est pas bien de voler ses oeufs à la jeune fille et qu'il faut les lui rendre, tu te sens obligée, du haut de tes 27 ans, de bredouiller que non non c'est bon c'est pas grave gardez-les (sales gosses !).
Heureusement, j'en trouvais quand-même toujours beaucoup plus qu'eux. Ben oui. Parce que l'un des grands avantages de la vie d'adulte - et ça, on ne le dira jamais assez -, c'est que tu déchires à la chasse aux oeufs.

(Il paraît que le côté femme-enfant n'est pas vendeur. L'autre jour, un mec m'a dit que si je mangeais des céréales le matin, il espérait pour moi que ça n'était pas des Chocapic, parce que selon lui, des Chocapic risquaient de faire fuir une conquête éventuelle. Je lui ai répondu que peut-être, mais qu'en attendant la dernière fois que j'avais ramené une conquête chez moi, justement, (Astro), il m'avait réclamé du Nesquik. Le mec a ri. Il m'a dit qu'il préférait le Benco) (Je crois que je n'ai pas bien compris ce qui se tramait dans cette conversation). 

Bref. Souvent, à Pâques, je repense à tout ça.


Mais surtout, ce qui m'a rendue nostalgique, ces-jours-ci, c'est cette vidéo :
(parce que c'est tellement vrai)




Gentleman Joe et moi, on jouait tout le temps. On se faisait des blagues, on faisait les cons, il me faisait rire, on était heureux. On faisait des boums tout seuls dans le salon, on jouait à faire semblant de s'engueuler (oui ça paraît un peu étrange comme ça mais on était vachement doués), il faisait super bien le pingouin (c'est rare, chez un homme), on faisait régulièrement des batailles de pouces (activité édifiante s'il en est), et oui, aussi, en effet, on jouait à la barbichette (je perdais tout le temps) et on mangeait des bonbons devant des films d'horreur.
C'était mon meilleur ami.
C'est avec lui que j'ai grandi, avec lui que j'ai voyagé à travers le monde, avec lui que j'ai dormi à la belle étoile sur une place déserte dans un petit village des Cyclades, avec lui que j'ai vu le soleil se lever dans les montagnes au nord de l'Argentine au milieu des lamas, avec lui que je me suis baignée dans le lac de Garde la nuit, avec lui que je voulais passer ma vie et avoir des enfants.
Et puis la vie nous a séparés, et aujourd'hui c'est un étranger. Quand on se voit, il y a les deux nous d'avant qui s'aiment encore, et puis les deux nous d'aujourd'hui qui ne savent pas trop quoi dire.
Il me manque davantage quand je le vois que quand je ne le vois pas. Alors je ne le vois plus.
C'est triste. 

Et puis il a changé, aussi. 


Quand je l'ai rencontré, il portait des Tshirts Wham et autres T-shirts débiles, des baskets, des jeans et des pantalons rouges ou oranges. Il avait un frigo jaune années 60 qui lui servait de bibliothèque et une roue de vélo en guise de lustre au plafond. Il adorait danser sur Blondie, il aimait les Froot Loops et les glaces arc-en-ciel multi-fruits, il se déguisait en Charlie de "Où est Charlie ?" aux soirées déguisées, et la première fois que je suis venue chez lui, il a insisté pour me montrer California Man. (Un grand film). 
Autant dire que Gentleman Joe était le lover du siècle.
Bref, nous étions faits l'un pour l'autre. 





















Aujourd'hui, Gentleman Joe ne porte plus que des chemises, des pantalons de ville sombres et sobres, des vestes très chères et très bien coupées avec de beaux tissus, et des chaussures de ville en cuir. Il écoute du classique et de la musique contemporaine. Il ne va plus voir que des films de Fellini ou de Stalker dans les petits cinémas du quartier latin. Il n'a plus que des meubles chers et design, dans les blancs et les gris.
Ca reste une de mes personnes préférées au monde, mais il a changé.
Il est devenu grand. Il est devenu sérieux.
Ce n'est plus le garçon que j'ai connu. Il n'a plus vingt ans. Il a vieilli. Moi aussi, d'ailleurs.
Et puis on n'est plus ensemble. On ne peut plus rigoler comme avant. Plus rien n'est comme avant.
C'est triste.

Mais bon, plus que Gentleman Joe lui-même, ce qui me manque, c'est ce que j'avais avec lui. 
Un amour et une complicité que je n'ai plus connus, à part avec Mr Duplicity, quand on partait en vacances en amoureux, qu'on chantait à plein poumons dans la voiture, qu'on regardait des conneries à la télé, qu'on dansait pieds nus le soir dans le jardin en buvant du champagne, qu'on faisait la grasse matinée en lisant des BDs et que brièvement, très brièvement, j'oubliais qu'il était marié à quelqu'un d'autre.
Sauf qu'il était marié à quelqu'un d'autre.

Avec Astro, ça aurait pu marcher. On a pourtant passé de bons moments, regardé How I Met Your Mother dans les bras l'un de l'autre au petit déjeuner, rigolé en regardant des conneries sur Youtube tard le soir, discuté pendant de longues heures aux terrasses des cafés. J'aimais bien Astro parce qu'il était à la fois malin et marrant, réfléchi mais pas prise de tête, intello mais pas bêcheur. Et puis il était gentil. Facile à vivre. Tendre. Et il était enthousiaste, aussi. Vivant. Curieux. J'aurais été bien avec lui, je crois. C'est dommage.

Mais bon. J'en trouverai un autre. 
La question est : où ? 
Où est mon Charlie ?         
Va falloir chercher. 

Pffff. Y a du boulot.
(C'est un peu comme une immense chasse aux oeufs, quand on y pense). 

























Je l'ai trouvé ! Il est à côté des bottes vertes, à gauche de la caissière.
Bien.
Ceci étant établi, maintenant je fais quoi ?

Sinon, j'ai envisagé de publier une pub Kinder pour l'occasion - Pâques, tout ça - mais rien à faire, ça me donne envie de chounier. C'est un phénomène très étrange. Et puis ça ne marche pas avec les récentes, hein, juste avec les vieilles pubs vintage avec des acteurs aux dents ultrabright qui sourient très fort et jouent très mal. C'est incompréhensible et passablement inquiétant.

(D'ailleurs à ce propos peut-être que je ferais mieux de taire ce détail à l'avenir, non ?)

1 commentaire:

  1. ce ressenti je l'ai eu longtemps aussi après avoir passé 12 ans avec quelqu'un que j'avais connu à 16 ans... Aujourd'hui, je suis bien avec quelqu'un d'autre alors ça donne de l'espoir, nan ma biche?

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