vendredi 29 mars 2013

J'ai mal à l'éthique

Booyah !

Tranche de vie de prof. Pour toi, Marie.



Cette semaine, j'ai découvert que mes petits élèves chéris étaient en réalité de dangereux homophobes. Argh.
En effet, après un cours, l'autre jour, quatre élèves (un garçon et trois filles) m'ont demandé si j'étais allée à la manif de dimanche dernier, ce à quoi je leur ai répondu, spontanément, que "Bien sûr que non ! Je suis pour le mariage gay", sans imaginer une seule seconde que eux pouvaient être contre. 
(J'avais cela dit eu un indice au lendemain de l'élection présidentielle : quand je leur avais fait dire, en anglais, en début d'heure, que "Today we have a new President" (je comptais évidemment m'en tenir à du "factuel"), ils avaient tous commencé à hurler et à huer François Hollande. Il ne m'était bêtement pas venu à l'idée, cruche que je suis, que des élèves de banlieue défavorisés pouvaient ne pas être de gauche. Cela dit je ne suis pas sûre qu'ils connaissent la différence entre la droite et la gauche, hein. Et puis ils détestent aussi Sarkozy - sans savoir grand chose de lui, d'ailleurs. Si j'ai bien compris, s'ils n'aimaient pas Hollande, c'est essentiellement parce qu'on leur avait dit qu'il voulait réduire les vacances d'été). 
Bref, quand je leur ai dit que j'étais favorable au mariage gay, ils se sont mis à crier. "Vous êtes sérieuse ?!", "Vous êtes bizarre, madame !", avant de soutenir que les couples homosexuels, c'est "dégueulasse", et de me scander avec entrain les slogans "Un papa, une maman" en racontant joyeusement leur première manif (ils avaient accompagné leurs parents). 
J'ai eu comme un frisson.

J'en ai ensuite discuté avec Isidor, qui m'a raconté que quand ils avaient étudié la Seconde Guerre Mondiale et les camps en Histoire, il leur avait appris qu'on avait envoyé dans les camps, entre autres, les juifs ("Ah comment ça se fait trop pas, vas-y !"), les handicapés ("Ah comment ça se fait trop pas, wesh") et les homosexuels ("Ouais ben ça c'est normal !"). 
Ne les diabolisons pas, cela dit : toute la classe n'a pas dit ça, ça devait être le fait d'un seul élève, ou de deux-trois au pire. Mais bon. Ca reste dramatique.
C'est limite à celui qui criera son homophobie le plus fort. Parce que dans la cour de récré, soutenir le mariage homosexuel, pour un élève, c'est s'exposer aux railleries : "Ah ouais c'est parce que t'es pédé, c'est ça ?! Hahaha". A l'inverse, dire haut et fort qu'exterminer les homos ou leur refuser des droits fondamentaux, c'est normal, ça revient à clamer sa virilité, à dire que t'es un "vrai mec". 
C'est tragique. Absolument tragique.
Ces petits gamins qui hurlent au racisme dès que tu leur mets une heure de colle ("Ouais c'est parce que je suis noir c'est ça ?!") trouvent parfaitement normal de traiter les homosexuels comme des parias. C'est normal, quoi. Pas de problème.
Ca laisse sans voix. 

J'aimerais en parler avec eux. Mais bon, je ne l'ai pas fait sur le coup (c'était avec un petit groupe, en fin d'heure, je fermais la porte de ma salle), et je ne vais pas prendre une heure pour aborder le sujet et organiser un débat, ça n'est pas ma place. Délicat. Peut-être que c'est plutôt Isidor qui devrait leur en parler, en Education Civique. Mais bon, le pauvre, il a déjà méchamment galéré quand il a dû leur faire un cours sur la laïcité... (Oui, la laïcité est au programme. Et c'est une très bonne chose. Mais c'est un sujet sensible).

Bien sûr, ils ne font que répéter ce que leur parents leur enseignent (c'est eux qui les ont traînés à la manif), mais quand même, je trouve ça terrifiant. 
Bien sûr qu'à l'école les gamins sont bêtes, et je sais que c'est monnaie courante de se faire "traiter" de pédé ou de lesbienne, mais bon. Oui. Les jeunes sont cons. Certes. Mais moi, je me souviens que quand, en cinquième, les gens nous traitaient de lesbiennes, moi et ma meilleure amie, en guise de réponse, on se faisait des smacks sur la bouche en pleine cour avant de leur dire d'aller mourir. Parce que déjà à douze ans, il était hors de question qu'on se rabaisse à dire "Non, arrête, on n'est pas lesbiennes, même pas vrai". C'était de la provocation stupide de notre part, mais c'était quand même moins bête. On avait au moins la décence de traiter ça par le mépris. Mais bon, je sais pas, j'imagine qu'on n'avait aucun mérite. On était, comme eux, les fruits de notre éducation, et on avait appris à mépriser l'homophobie au même titre qu'eux avaient appris à mépriser l'homosexualité. On avait juste eu des parents ouverts d'esprit. On avait grandi dans un milieu ouvert d'esprit.Et puis l'homosexualité féminine est mieux acceptée que l'homosexualité masculine, aussi. Donc c'était moins difficile, j'imagine. Je sais pas. 

Et puis bon, ils sont petits. Ils ont onze ans, ils n'en ont pas trente.
Ils connaissent rien à rien. Ils grandiront. Ils apprendront.
L'autre jour, ils ont également poussé des cris quand ils ont appris que je ne connaissais pas Keen V et Tal. "Quoi ?!! Vous connaissez pas Keen V et Tal ???!!! Oh la la... Mais vous écoutez quoi alors madame ??? Du classique ?!" (NB : "Keen'v, de son vrai nom Kevin Bonnet, né le 31 janvier 1983 à Rouen, est un chanteur de Ragga Dancehall") (Hahaha). Bref. 
(Enfin, heureusement, ils ont ensuite découvert que je savais - au moins - qui était Kim Kardashian. Ils ont donc décidé que je n'étais pas complètement inculte et irrécupérable. Ouf). 

J'avais déjà été confrontée à l'homophobie primaire de certains étudiants dans l'école de commerce où j'enseigne quand, il y a quelques semaines, des petites étudiantes versaillaises avaient clamé leur homophobie sans complexe, et avec véhémence. 
J'étais restée bouche bée. 
Pour mon premier cours, j'avais organisé un faux speed-dating : les étudiants avaient tous des fiches personnages, et ils devaient faire connaissance. A chaque fiche du rang A correspondait une des fiches du rang B, pour que chacun, à un moment du speed dating, rencontre l'âme soeur. 
Le tout devait avoir lieu en anglais (c'était pour leur faire retravailler les présentations de base : nom, âge, profession, situation familiale, hobbies, désirs pour l'avenir, ce genre de choses) et à la fin, chacun devait s'asseoir en face de son "âme soeur" et les couples ainsi formés devaient m'expliquer (en anglais toujours) pourquoi ils étaient faits l'un pour l'autre.
J'avais déjà fait cet exercice avec plusieurs groupes, et ils s'étaient toujours beaucoup amusés.
Cette fois-là, apprenant que j'allais avoir un groupe fait essentiellement de filles, j'avais prévu un certain nombre de couples lesbiens dans mes fiches-personnages. Je l'avais déjà fait auparavant avec d'autres groupes de filles, et ça n'avait, jusque là, jamais posé de problème. 
Or, ce jour-là, deux de mes élèves filles ont fait un esclandre : "Ah non, moi je fais pas une lesbienne, y a pas moyen, ça va pas non ?!". J'étais stupéfaite.
Un des mecs était absent, j'ai donc refilé un rôle de mec à une des filles et une fiche de femme hétéro à l'autre, en leur faisant comprendre que j'étais 1) agacée 2) outrée. (Je n'allais pas leur faire un grand discours sur l'homophobie, là n'était pas ma place - et franchement, ça n'aurait servi à rien - d'ailleurs le débat sur le mariage gay qui a eu lieu en anglais au cours suivant entre les élèves n'était franchement pas glorieux : les élèves qui y étaient "à priori" favorables étaient en minorité, trop intimidés par la majorité, et trop peu sûrs de leurs arguments pour les défendre). 
Pendant la partie de speed-dating, la fille à qui j'avais donné une fiche d'homme hétéro a donc, évidemment, été amenée à rencontrer des filles avec des fiches de femme lesbienne : et à chaque fois, elle ricanait et refusait de leur parler, comme si elle allait être "contaminée". Quand je l'ai engueulée, elle a arrêté, et a accepté de "jouer le jeu", mais a bien protesté au préalable.
C'était risible. Et nauséabond. J'avais envie de la virer à coups de pied au cul.
Bref, cette fille de vingt ans, à priori éduquée, faisait preuve de la même homophobie puérile et bruyante que mes petits caïds de banlieue... C'était horrifiant. 

Je n'ai pas l'habitude d'entendre des discours homophobes proférés aussi ouvertement et de façon aussi décomplexée. Je n'évolue pas dans un milieu où je suis confrontée à ça. Honnêtement, je ne pensais pas vraiment que ça existait en vrai. Des clichés pareils, je veux dire. Enfin si, je le savais, mais pas à ce point, ou du moins dans un monde parallèle, pas dans le mien. Je ne pensais pas y être confrontée un jour de plein fouet, en tout cas. 
Pourtant, ce n'est pas la première fois que j'entends des élèves dire des atrocités.
Il y a quelques années, un élève a été poignardé dans un collège avoisinant. Quand j'en ai parlé au cours suivant avec mes élèves, en anglais toujours, pensant qu'ils allaient, en gros, me dire que c'était "scary" et "terrifying", j'ai à la place été amenée à entendre ça : "Non mais attendez madame on peut pas juger, hein. On connaît pas l'histoire, nous. Ca se trouve il l'avait cherché". (......). 
Inutile de souligner que la plupart de mes élèves sont pour la peine de mort. ("Enfin, surtout pour les violeurs d'enfants, hein madame").... Au secours.
Après la mort de Mohamed Merah, quand on a dû faire une minute de silence dans tous les collèges de France, il a aussi fallu que je leur explique - et j'ai réussi à les convaincre - que non, il n'avait pas eu raison, Mohamed Merah, de tuer des petits juifs sous prétexte qu'Israël ne traite pas bien les palestiniens, parce que les petits juifs ils avaient rien fait, c'était pas de leur faute, c'est pas parce que t'es pas d'accord avec la politique d'Israël que t'as le droit de tuer des juifs, ça s'appelle du terrorisme et c'est pas bien...
(Ils ne sont pas antisémites, hein. Ils auraient condamné le meurtre de ces enfants s'il s'était agi d'un "simple meurtre antisémite", donc "raciste". Ils sont contre le racisme. Et, par ailleurs, ils ne connaissent rien au conflit israëlo-palestinien. Mais ils respectent le côté "oeil pour oeil, dent pour dent". L'idée de vengeance. Ils ont une conception de la justice très personnelle).

Bref. Ouch.
On n'est pas rendus.

Bon, et sinon, pour en rester sur ce beau sujet du mariage pour tous, je vous envoie en lien cette belle vidéo à l'humour d'une grande fraîcheur n'est ce pas. (Non, je n'ai pas un humour très fin).



25 commentaires:

  1. Ça fait peur... C'est dramatique de penser que dans un pays soi-disant évolué, il existe encore de telles réactions. Bien sûr, ce sont des enfants, mais s'ils pensent ainsi, c'est qu'il y a les parents derrière. Des gens responsables d'incitation à la haine... C'est terrifiant.
    Je ne vois qu'une solution : je pense que je vais m'exiler dans une yourte perdue au fin fond de la Mongolie (où une bergerie dans le Larzac, je sais pas trop encore).

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    1. Je suis bien de ton avis.
      Malheureusement je crains que les chèvres du Larzac n'aient pas une opinion beaucoup plus éclairée sur le sujet. (Quoique).
      Si ça se trouve, les chèvres du Larzac sont de grosses réac', hein. Renseigne-toi avant de tout plaquer !

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  2. Les gens oublient trop vite qu'ils ont été des gosses ou des ados, avec des amis fils de bourgeois, d'ouvriers, de paysans, ou de sans profession. Et que ces gosses étaient parfois intéressants, et parfois de gros cons!

    Le temps ne fait rien à l'affaire
    Quand on est con, on est con

    Les parents ont bon dos! Ils jouent un rôle certes, mais l'humain prend très vite son propre chemin de con sans qu'on l'y aide forcément!

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    1. Je te trouve dur. Heureusement qu'on n'est pas condamnés à toujours rester les mêmes qu'à onze ans ! A onze ans on connaît rien à rien, on répète ce qu'on entend. Les filles qui étaient des pestes au collège ne sont toutes pas devenues d'horribles harpies, les petits caïds ne sont pas tous devenus des petites frappes, les victimes ne sont pas tous restés des victimes, et tous les réactionnaires ne font pas des enfants réactionnaires. Heureusement qu'il reste la possibilité d'apprendre, de nuancer ses opinions, de se bonifier, de mûrir. Rien n'est écrit d'avance. Encore heureux.

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  3. Je n'ai pas dit le contraire! QUant à l'histoire des réctionnaires, tu vas dans mon sens, relis mon com! (pour une prof, tu lis mal!:p)

    Ce que je voulais dire, c'est que même un gosse décide - "parce que ça l'attire intellectuellement ou par affinité" - de suivre la petite merde raciste, ou l'avis de ses parents foireux , plutôt que son pote sympa et effacé. et l'avis de son prof, ou de son grand frère! Un gosse est bien plus intelligent et réaliste qu'on voudrait le croire, très rapidement nous prenons le parti d'être ce que nous guide notre intelligence et notre conscience.

    Je ne pense pas qu'on change fondamentalement, un petit coq raciste restera fondamentalement un petit coq, après il modèrera ses opinions ou se radicalisera, à moins de se faire casser par la vie, là il changera peut-être!

    Il n'y a que les coups sur la tête qui font changer l'humain fondamentalement, si tout baigne, il restera un pourri si ça l'arrange! A quoi bon changer quand tout nous réussit dans la vie, n'est-ce pas la devise du bon humain selon saint gros con?
    L'amour met aussi des coups sur la tête, et là, ça peut changer les choses, mais que se passe t il quand l'amour s'en va???

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    1. A cet âge-là, c'est difficile d'aller contre ton éducation, contre l'opinion de tes parents, d'autant plus que tes parents sont ta référence, ce qu'ils disent est parole d'Evangile. Je répétais moi aussi ce que disaient mes parents sans le remettre en question, persuadée du bien fondé de leurs propos. Et puis on est influençable, à cet âge-là, c'est difficile d'aller contre la pression du groupe. Mais j'ai bon espoir, je pense que ce sont pour la plupart des enfants intelligents. Ils grandiront.
      Sinon bonjour, Jo. (Même quand tu ne signes pas, je sais que c'est toi, tu sais) :)

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    2. Tes propos ressemblent à un poisson d'avril:)

      Ben, moi, non, les groupes mes faisaient fuir, plus con qu'un humain, un groupe d'humains! Et quand mes parents disaient des conneries, même si je les aimaient bien, je me foutais d'eux!!! Les pauvres, je ne les ai pas épargnés!:d ET tu oublies la crise d'ado!!!!!!!!!

      Un prof, même si un gosse l'aime bien est rarement moteur, il reste un prof avant tout! Les éducateurs sportifs sont bien plus admirés, ils sont des exemples, enfin, parfois ça fait peur...

      Un gosse est "lui-même" dans la cour de l'établissement, c'est là qu'on voit qui il est réellement...

      BEn, moi c'est LOUISE, pas jo!:)

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    3. Tiens donc ! Bonjour, Louise ! (Ou alors tu es Jo qui me fait un poisson d'avril ?) (Tu vois, c'est sans fin ce truc) ;)

      Oui, tu as sûrement raison, en fait. La crise d'adolescence où justement tu penses que tes parents ne disent QUE des conneries... C'est vrai que tu peux très bien choisir d'autres exemples que tes parents. Et c'est vrai aussi qu'à l'école les élèves se révèlent, et ne se comportent souvent justement pas du tout comme chez eux. Et que beaucoup d'adolescents détestent les groupes et ne souffrent donc pas de "peer pressure"... Bref. Je ne sais pas. Peut-être que je me mens. Que j'essaye juste de me rassurer, et de trouver des excuses à mes élèves. Tu oublies que je dois les voir tous les jours, moi. J'ai BESOIN de les aimer.

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    4. Mais ça n'empêche pas justement d'être un prof souriant, aimable, juste, positif, qui ne fait pas pour autant de démagogie, qui n'oublie pas que lui même a été élève avec ses faiblesses, qui reste proche d'eux, les écoute, et répond à leurs questions, même parfois hors sujet en fin de cours! Ca c'est évident, et certains profs oublient bien souvent cette évidence pédagogique et de bon sens!

      :)

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  4. Merci bien ! C'est un aspect peu abordé en général que celui-ci, très bonne idée d'article !
    Effectivement cette situation est fort délicate, mais comme tu l'as dit en réponse au commentaire précédent : "heureusement qu'il reste la possibilité d'apprendre, de nuancer ses opinions, de se bonifier, de mûrir"... je crois bien d'ailleurs que l'école est ou devrait être le lieu privilégié pour ce faire !
    Espérons que l'éducation publique pourra apprendre la tolérance à ces jeunes, sans chercher à leur imposer une opinion contraire à la leur mais en les invitant à questionner leurs certitudes acquises on ne sait où ni comment, mais sans doute pas dans un contexte très propice à la réflexion et au développement de leur esprit critique (et il est en effet permis d'espérer : ils n'ont que onze ans !)... Bon courage pour cette tâche difficile ! Et encore merci pour ton témoignage !

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    1. Merci de ta fidélité, chère lectrice !
      Et sinon oui, grosse responsabilité pour l'école publique. J'espère qu'on sera à la hauteur.

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  5. Attends que Rihanna participe à une campagne H&M contre l'homophobie et ils vireront leur cuti!

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    1. So true. L'école publique n'est rien face à Rihanna :)

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    2. Oui! Et Sexion d'Assaut avec leurs superbes déclarations homophobes! Les gosses ont choisi...

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  6. Je réfléchissais justement au racisme ce week-end avec des amis. On s'était fait une cure de vieilles pub des années 80 (genre Banania par exemple) et on se demandait si c'était vraiment pire aujourd'hui ou si la forme d'expression du racisme n'avait pas simplement changé. Comme tu le dis, être raciste, c'est mal, être homophobe c'est permis. Mais est-ce vraiment différent ? Je pense que la haine ou plutôt la discrimination a juste changé d'objet. Un adolescent a besoin, pour se sentir adapté, de rejeter certains individus du groupe. Que ce soit a cause de la couleur de peau, de cheveux, la religion ou l'orientation sexuelle, cela importe peu, tant que c'est profondément inscrit dans la personne à blesser et qu'il n'y peut pas grand chose.

    Je pense que tu vois tes élèves à un âge très ingrat de leur vie. Ils ont toute leur éducation derrière eux, des chaînes dont ils essaient de se défaire en adaptant un anti-conformisme qui les rend adapté à leur groupe d'âge (c'est ce que j'appelle l'anti-conformisme de conformité, c'est tout un concept). Ils disent ça parce qu'ils l'entendent. Parce que ça choque les "bobo" et qu'il ne faut surtout pas qu'on les prenne pour l'un d'eux. Parce qu'ils ont autre chose à dire mais ne savent pas comment. Parce qu'ils ne comprennent pas, parce que c'est plus facile de faire souffrir les autres que de souffrir eux-même. Pour tout un tas de raison à eux je pense. Cela ne veut pas dire qu'ils sont incapable d'une véritable réflexion derrière. Je suis certaine qu'en plus des quelques courageux qui ont osé s'élever contre le groupe, d'autres s'en fichent au fond et ne font qu'aboyer avec la meute (c'est moins fatiguant) (l'adolescent est un flemmard) (oui, j'aime bien les clichés, c'est rigolo).

    J'écris un peu comme je pense alors c'est le bordel.

    En fait, en y réfléchissant, je pense aussi que leur homophobie doit venir d'un ras le bol. Ils sont à un âge où ils découvrent la sexualité. C'est un truc à la fois très familier et très étrange pour eux; Ca doit être déstabilisant d'entendre un certain groupe de personne se faire définir par leur orientation sexuelle tu ne trouves pas ? On en parle sans arrêt depuis des mois. Alors qu'en même temps il y a un tabou terrible sur d'autres différences, peut-être plus visible. C'est à ne rien y comprendre. Donc faisons comme tout le monde et on sera sûr de pas avoir d'ennuis.

    Expliquez leur que traiter quelqu'un d'homo c'est être raciste du sexe, ça les fera ptet réfléchir ! :P Je sais que, personnellement, quand je rencontre quelqu'un, je ne commence pas par lui demander son orientation sexuelle. Je m'en fiche un peu. (Sauf si je veux le mettre dans mon lit mais c'est pas ce qu'il y a de plus fréquent).

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    1. Wow, ça c'est un long commentaire, Deryn !

      C'est vrai ce que tu dis, j'en discutais avec des amis aussi ce week-end : jusqu'à aujourd'hui, l'homophobie était aussi tabou que le racisme, mais ce débat a créé un effet de groupe qui a décomplexé les homophobes. Ils se sont rendu compte qu'ils étaient nombreux, et ils peuvent enfin crier haut et fort ce qu'ils pensaient jusqu'alors tout bas. L'effet de groupe les galvanise et leur donne un sentiment de légitimité.

      Sinon oui, en effet, il faut dire aux élèves que l'homophobie est une forme de racisme : le mot "racisme", pour eux, c'est le mal. Ca les ferait réagir. Mais bon, quand je leur ai dit que les homos étaient "des gens comme les autres" ils se sont empressés de me dire que non, ils n'étaient pas comme les autres, et que donc ils ne pouvaient pas demander à être traités comme tels (hmpf). J'ai été tentée de me lancer dans une longue diatribe, mais j'étais dans le couloir, j'étais prise de court et j'avais des photocopies à faire, et ensuite l'occasion ne s'est pas représentée. D'autant que c'est compliqué, quand même, de leur dire que je pense que leurs parents sont des sales réac'...

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    2. Ca c'est certain d'autant plus que je crois qu'un prof n'est pas habilité à donner son avis personnel sur ce genre de choses (j'ai eu un prof d'histoire géo qui a eu des soucis pour nous avoir apprit que la même information pouvait être traitée différemment en fonction de l'orientation du journal qui la traitait. Et pourtant elle avait fait le tour de touuuuutes les opinions pour être sure de rester neutre...). Vous (les profs) marchez sur une corde raide qui doit être difficile à gérer.

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    3. Oui. Je sais. Je ne suis pas du tout en droit de me poser en maître à penser. Mais en même temps, je représente la république, et la république stipule que les homosexuels sont des citoyens comme les autres, non ? Bref. Compliqué.

      Par contre cette histoire de prof d'Histoire me dérange : c'est pas son boulot, justement, d'apprendre aux élèves que les historiens dignes de ce nom visent l'objectivité mais que, si les faits restent les faits, la façon de les présenter et l'interprétation qu'on en donne sont toujours subjectifs ? C'est un des aspects essentiels de l'Histoire, il me semble. Et c'est très important d'avertir les élèves de l'orientation politique et de la subjectivité des médias. Je suis sûre que c'est au programme, en plus.

      A ce propos je me faisais une réflexion l'autre jour : vous avez remarqué qu'on ne nous enseigne pas la Guerre d'Algérie à l'école ?

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    4. Oui enfin, des gamins j'en ai entendu et observé un grand nombre et depuis pas mal de temps, et quel garçon ne se fait pas traiter de sale PD, de tarlouze, se sale fiotte, de petite pédale, de Chicken (même pendant des matchs de tennis pros!), de gros phoque, ....., lorsqu'il n'accomplit pas le défit débile qu'on vient de lui infliger, ou qu'il a vexé un gros con!

      Non, ça a toujours été, il vaut mieux passer pour un voleur, un violeur, un type d'extrème droite, qu'un homosexuel, et ça chez les gamins autant que chez les adultes! Enfin, je ne connais que des établissements urbains, de banlieux, et de la campagne, alors peut-être qu'ailleurs c'est le paradis.
      L'enseignement et la loi ne pourront jamais mettre une fin à tout ça, c'est HUMAIN, malheureusement! ET si tu regardes l'hitsoire de l'humainté, c'est encore pire, il suffit de lire Jules Verne, ça fait peur quand il parle de l'afrique!!!!!!!!!!!!!!!

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    5. Bon, eh, dites, les anonymes, vous ne voudriez pas avoir un nom, que je sache à qui je parle ?
      Oui enfin on n'est pas là pour dire que le monde est pourri, hein. Pas très constructif.
      Et puis d'où sort Jules Verne, tout à coup ? Le monde est pourri parce que Jules Verne était raciste, maintenant ?
      Mais Jules Verne était le fruit de son époque, lui aussi. Bien sûr que la plupart des gens avaient un esprit colonialiste, en son temps. Qui aujourd'hui peut affirmer qu'il aurait pensé autrement ? Un peu d'honnêteté intellectuelle. Faut pas tout mélanger.

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    6. Cela dit, je suis d'accord que la bêtise haineuse et bornée des sales petits coqs ignares et butés de ce bas monde qui jouent à qui a la plus grosse et mettent leur honneur et leur dignité dans la taille de leurs couilles sont un des pires fléaux de l'humanité, hein.

      Mais on n'est pas là pour enfoncer des portes ouvertes et se taper dans le dos en se plaignant de "la lie de l'humanité", faire des généralités et cracher sur le monde de façon radicale, unilatérale et stérile. Merci.

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    7. Ben voilà un beau commentaire!:d

      Si j'ai parlé de Jules Verne c'était pour dire que ça n'a rien de nouveau, la haine des ignares qui vont dans le sens du mâle crasseux, de la mode ou de la propagande politique et médiatique du moment.

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    8. Je ne voudrais pas être désagréable mais cette phrase n'a aucun sens. Même si je crois avoir compris l'idée essentielle de ce fourre-tout pas clair, qui est que ça n'a rien de nouveau et qu'il y a toujours eu des gros méchants vilains pas beaux dans le monde, c'est ça ?
      Dans ce cas, merci pour ce commentaire éclairé et constructif. Je propose moi aussi que nous signions tous la grande pétition pour les gentils contre les méchants.

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  7. Ben visiblement, nous apprendre la non-existence de l'objectivité journalistique a dérangé. elle nous avait fait enregistrer le 20h du même jour sur différentes chaines et acheter des quotidiens allant de Libé au Figaro en passant par La Croix et d'autres. C'était très intéressant.

    Et non, je n'ai pas appris la Guerre d'Algérie à l'école. J'ai appris la préhistoire, les gaulois, les romains, Charlemagne, Jeanne d'Arc, Louis XIV, La première guerre mondiale, la seconde guerre mondiale, la seconde guerre mondiale, la seconde guerre mondiale et la seconde guerre mondiale. Et un peu ce qui s'était passé entre les deux guerres aussi.

    On parle très peu de la politique colonialiste du vieux continent et comment celle-ci s'est effondrée. Pourtant, c'est une conséquence directe de ladite seconde guerre, si j'ai bien tout bien suivi. *n'est pas forcément très calée en histoire, Fortunes de France et Rois Maudits exceptés*

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    1. "J'ai appris la préhistoire, les gaulois, les romains, Charlemagne, Jeanne d'Arc, Louis XIV, La première guerre mondiale, la seconde guerre mondiale, la seconde guerre mondiale, la seconde guerre mondiale et la seconde guerre mondiale". Ca me semble un bon résumé, en effet :)

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